Evaluation de la surmortalite

Publié le par Sacha Sher

Evaluation de la surmortalité sous la révolution cambodgienne.

Sacha SHER

Le 17 avril 1975, Phnom Penh surpeuplée tomba dans le camp du F.U.N.K. et fut rapidement dépeuplée. Le 5 janvier 1976, les révolutionnaires proclamèrent l'avènement du Kampuchéa Démocratique. Pour faire bonne apparence, une Assemblée Représentative fut élue le 20 mars 1976 au cours d'un simulacre d'élections, mais elle ne se réunit qu'une fois, le 12 avril, pour voter à main levée la composition du gouvernement 1. En avril 1976, Pol Pot devenait officiellement premier ministre. Le régime s'effondra le 7 janvier 1979, date officielle de la victoire vietnamienne au terme d'un an de combats frontaliers et de deux semaines de guerre éclair, après que les premières lignes cambodgiennes furent percées.

Le régime du «  Kampuchéa Démocratique  » exécuta ou enferma d'abord les membres de l'appareil administratif et surtout militaire de l'Ancien régime. La détention touchait ensuite les intellectuels, les personnes dont les proches avaient servi la République ou la monarchie, puis tout élément dont les comportements étaient jugés mauvais, contre-révolutionnaires ou en contradiction avec la ligne. Les mauvais éléments ou les espions pouvaient englober, localement, des personnes ayant pris part à des manifestations, à des tentatives répétées de vol et de fuite, ou simplement des personnes qui avaient manqué d'enthousiasme au travail ou avaient exprimé leur nostalgie du passé. Les tentatives de résistance étaient généralement sanctionnées par l'emprisonnement, l'interrogatoire, puis la mort. Les autres décès étaient dus à la famine, à la sous-alimentation, à l'épuisement au travail, aux déplacements éprouvants, aux périls de l'exil, à la guerre contre le Vietnam, à l'accroissement des maladies provoqué par les carences alimentaires, par l'absence d'immunité aux microbes et aux parasites d'une région, par le manque d'hygiène - même quand des soins étaient prodigués - et par les accidents inhérents à l'affaiblissement physique (chute d'un palmier, noyades, etc.), à l'absorption de plantes empoisonnées, etc.

Avec le recul, le bilan de la répression et de la surmortalité imputables à l'application de la politique du régime révolutionnaire reste assez imprécis. Les quelques personnes qui se sont lancées dans des calculs statistiques ne présentent pas toujours les étapes de leur démarche. Une recherche statistique récente de Patrick Heuveline compare les différentes méthodes d'estimation de la mortalité imputable à la révolution, avec les marges d'incertitude que chacune d'elles comporte. Mais cette étude présente ses propres recherches de manière allusive et se «  focalise sur les marges d'estimation et d'erreur plutôt que sur la recherche d'une meilleure estimation du nombre de morts par excès  ». La conclusion que le lecteur doit tirer est que le total des disparus, pour la période allant de 1975 à 1980, famine de 1979 comprise (peut-être 500 000 morts, dûs principalement à la désorgansiation 2), se situerait en bonne probabilité entre 1,5 et 2,5 millions, «  sans qu'on puisse formellement exclure un chiffre aussi bas que 700 000 ou aussi haut que 3,2 millions  », sur une population de près de 7 à 8 millions d'habitants. Entre 10 % et 50 % des victimes auraient péri en détention ou par exécution 3. Nous essaierons de porter un jugement sur les différents chiffres mentionnés. Dans tous les cas, ceux-ci devront être considérés en gardant en mémoire la situation héritée par les révolutionnaires (voir note plus haut), en tenant compte du fait que tous les conflits internes et externes n'étaient pas de la seule responsabilité des dirigeants, et du fait que les conditions climatiques n'étaient peut-être pas parmi les plus favorables, bien que l'on ait peu de renseignements à ce sujet  : un témoignage évoque une année 1976 marquée par la sécheresse 4, et un représentant du gouvernement canadien avait été «  très préoccupé  » en décembre 1978 par «  les grandes inondations de ces derniers mois  » en Asie du Sud-Est, au point qu'une aide de 250 000 $ avait été octroyée au Vietnam le 28 novembre 1978 5.

Une enquête de terrain récente chargée d'évaluer les victimes de la répression révolutionnaire, réalisée par le Documentation Center of Cambodia (D.C.Cam) a disposé de certains moyens mais est d'un intérêt limité du fait des méthodes employées et des zones d'ombres qu'elle présente. Dans un récent ouvrage, Crimes of the Khmer Rouge, Craig Etcheson résume les données relevées et tente une évaluation générale de la mortalité excédentaire fondée sur le projet de cartographie du centre qui consiste à évaluer  le nombre de morts en captivité. Le résultat des enquêtes effectuées en 1995-1999 sur tout le territoire, à l'exception de la province de Preah Vihear et d'une vingtaine de districts, aboutit à un chiffre d' 1 112 829  morts en captivité. Supposant que ces morts représentent 30 ou 50 % des morts sous le K.D., il est déduit que le nombre de morts s'élèverait à 2,2 voire 3,3 millions et que la «  mortalité excessive  » serait de 2,2 voire 2,5 millions soit 29 à 35 % d'une population supposée de 7 à 7,5 millions. Mais la présentation des procédés de l'enquête confirme ce qui apparaissait dans les numéros de la revue du D.C.Cam, Searching for the Truth, à savoir que les comptes sont trop souvent laissés à l'appréciation de témoins et que les massacres supposés ne sont pas suffisamment situés dans le temps. Le présupposé général est que le nombre de victimes en captivité peut être facilement déduit à partir de ce que sont censées contenir les fosses communes situées à moins d'un kilomètre des prisons des services de sécurité. Etcheson accepte qu'il ait pu se trouver, selon des témoins, à tel endroit, un hôpital non loin de deux prisons, et que des malades aient pu être enterrés dans le mêmes fosses que les prisonniers. Il estime toutefois que cela constituait l'exception plutôt que la règle. La seule enquête scientifique ayant été chargée d'établir les causes des décès, menée en juillet 2002 par Michael Pollanen, a eu lieu sur des ossements de trois mémoriaux et non sur des corps exhumés à partir de fosses. Le résultat était qu'une «  minorité significative  » - mais une minorité quand même - avait souffert de traumatismes physiques. Cependant, nulle datation des décès n'avait été effectuée. Etcheson appelle de ses voeux une autre enquête, car sans cela, les évaluations du Centre seraient remises en doute. Ajoutons que ce qui pose un problème de taille est que les enquêteurs du D.C.Cam n'ont pas non plus exhumé le moindre corps pour évaluer la contenance des fosses - mais peut-être cela coûte-t-il trop cher. Ils se sont contentés de relever les déclarations des autorités locales, les évaluations des victimes par des personnes qui les avaient enterrées ou par des voleurs de tombes qui les avaient déterrées, et de comparer toutes ces déclarations avec le nombre d'ossements regroupés en mémoriaux du souvenir et les nombres de corps exhumés portés sur des registres conservés par  des chefs locaux. Il a ainsi été relevé des écarts de 1 à 100 voire de 1 à 1 000. Ce qui paraît échapper à la vigilance des enquêteurs est que les mêmes autorités locales ont pu également gonfler les données des registres, plus ou moins longtemps après les premiers comptes. Pourquoi avoir retenu des procédés de comptabilité si peu objectifs  ? D'autant que les corps sont toujours présents sous terre et identifiables, contrairement, pense Etcheson, à ceux des victimes de guerre qui se seraient «  évaporées  » (vaporized) lors de l'impact des bombes lancées par les B 52. Peut-être est-ce faire peu de cas des témoignages divers indiquant que la population ne craignait pas tant les B 52 que les avions furtifs T 28 déverseurs de napalm 6. Ces témoignages sont sans doute insuffisants mais les armes volantes ont pu laisser derrière elles plus de corps qu'on ne l'imagine. Etcheson reconnaît que ses équipes ont trouvé au moins deux fosses remplies de victimes de guerre, mais considère néanmoins que la plupart des morts de 1970-1975 ont été incinérés. Cela peut à nouveau prêter à débat. Dans l'urgence, les victimes ont pu être enterrées près des pagodes avant d'être incinérées. Or, le fait est assez généralement reconnu que nombre de ces pagodes servirent, par la suite, de prison. Ces nombreuses réserves mettent finalement en doute le bien-fondé de l'enquête du D.C.Cam 7. Ce n'est certes pas la seule enquête démographique à comporter des incertitudes.

Toute tentative d'estimation est fondée sur des hypothèses de population. Ces hypothèses sont le résultat d'un processus plus ou moins long d'acceptation ou de remise en cause de données disponibles. Tout d'abord, les données de départ sont déficientes et insuffisantes. La plupart des estimations qui procèdent par la méthode de la soustraction s'appuient sur les chiffres du recensement de 1962, et varient en fonction des différentes estimations de la population cambodgienne pour l'année 1975. Comment faut-il donc apprécier les chiffres de 1962  ? Des avis contraires existent. Techniquement parlant, beaucoup de recensements ont tendance à sous-estimer la population. Selon une enquête de l'ONU de 1966, le recensement aurait été gonflé de 4 % 8. Selon l'ambassadeur de France Jean de Beausse, les données du recensement de 1962, par provinces et par villes, étaient par trop succinctes, et le chiffre de 5 748 842 habitants avait pu être «  forcé  » comme l'estimaient d'autres observateurs non mentionnés, pour donner davantage d'importance au pays sur la scène internationale. Cela constituait un «  brusque accroissement de population  » pour un pays qui ne devait alors compter tout au plus que 5 millions d'habitants 9. Peut-être l'ambassadeur avait-il eu en tête les données de l'enquête de 1958-1959 (4 845 000). En sens inverse, un rapport de l'ONU de 1966 jugeait ce dernier chiffre sous-évalué au regard du recensement de 1962. Quant au démographe Jacques Migozzi, il soulevait certaines lacunes du recensement de 1962 et considérait, qu'il y avait eu sous-dénombrement. Cette imprécision provient naturellement du fait que le recensement ne pouvait être suffisament fiable que dans les villes. Migozzi, en partant de l'évaluation de 1962 (5 738 300 ou, selon le chiffre donné par Migozzi, 5 728 711 habitants), parvenait en 1970 au chiffre de 7,3 millions d'habitants, ou, en prenant pour hypothèse un accroissement modéré de la population, au chiffre de 7 millions 10. On doit ensuite tenir compte, avant de parvenir à 1975, des victimes de guerre, du départ d'une majorité de Vietnamiens dès 1970, ou encore du nombre de réfugiés partis au Sud-Vietnam. En 1970, 300 000 Vietnamiens partirent du pays (300 000 selon Vickery, 310 000 selon Sliwinski, 320 000 entre 1970 et 1974 selon Banister & Johnson). Si l'on suppose que la natalité n'a pas été entamée par la guerre, et si l'on applique arbitrairement, pendant cinq années, à une population de départ de 7 millions d'habitants, le taux d'accroissement annuel de 2,9 %, donné par Migozzi pour les dernières années du Sangkum, on parviendrait en 1975 à une population de 8 075 602, auquel on retrancherait les 300 000 victimes de la guerre (le chiffre souvent accepté est de 500 000, proche des 600 ou 700 000 estimés par la C.I.A. comment étant le nombre global de morts «  liés à la guerre  », mais des démographes l'ont réduit à près de 300 000 11), ce qui ferait 7 775 602. Et si l'on retranchait de la population de juin 1970 le nombre de victimes avant de multiplier le taux d'accroissement, on arriverait à une population en 1975 de 7 729 515 habitants. Le résultat, serait forcément surévalué car il ne prendrait pas en compte la baisse d'accroissement naturel en période de guerre, l'impact des morts d'adultes sur la natalité de l'ensemble de la période. Selon Judith Banister et Paige Johnson, la réduction des naissances aurait été de 70 000 en 1970-1974 12. On peut donc imaginer qu'un résultat moyen basé sur un taux d'accroissement légèrement optimiste se situerait aux alentours de 7 750 000 - 70 000, soit 7 680 000. On pourrait aussi utiliser, dans nos extrapolations, le taux d'accroissement de 2,2 %, généralement utilisé par les autorités du pays pour évaluer la population en 1969-70. Appliquée pendant cinq ans à un nombre d'habitants supposé à 6,85 millions pour refléter les pertes à venir de la guerre, l'utilisation de ce taux sur cinq ans donnerait 7 637 391 en avril 1975 auquel on déduirait le déficit de naissances de 70 000 pour aboutir à 7 567 391. On peut prendre en compte cette diminuation des naissances par un autre moyen. Selon la C.I.A., la population a augmenté selon un facteur de 0,095 ou, selon Eng Meng-Try, d'environ 0,07 13. Dans les deux cas, le taux d'accroissement est bien inférieur à 2 %. Selon ces facteurs, on aboutirait, à partir d'une population fixée, par commodité, à 6 850 000 vers juin 1970, à une population de 7 500 750 ou de 7 329 500.  La C.I.A., partant d'une population estimée par les Nations-Unies à 7,06 millions en juillet 1970, et prenant en compte les désastres de la guerre, arrivait à une population de 7,364  millions habitants en avril 1975. Elle estimait qu'environ 250 000 Vietnamiens et Cambodgiens ayant des liens de parenté avec eux avaient été rapatriés durant les semaines suivantes 14. Selon ces diverses estimations, il pourrait être resté entre 7,1 et 7,3 millions d'habitants au début du régime du K.D., chiffres que nous choisirons pour effectuer des projections pour 1979. Curieusement, Marek Sliwinski avance que la C.I.A. retenait le chiffre de 7,3 millions et prend ce chiffre comme hypothèse de population la plus basse. C'est oublier le départ des Vietnamiens signalé par la CIA. Il est vrai qu'il n'estime qu'à 70 000 le nombre de Vietnamiens restés vivants au Cambodge après 1970 15. Quant à Ben Kiernan, il ne retient, dernièrement, comme estimation de la population en 1975, que le chiffre de 7,9 millions -  le même chiffre que celui donné par la Commission Economique et Sociale de l'ONU pour la moitié de l'année 1974 16, un chiffre certainement fourni par les autorités du Camboge - ce qui, pense-t-il, a l'heur de se conformer avec sa propre évaluation du nombre de «  victimes  » (1,5 millions) effectuée après enquête auprès de cinq cents réfugiés, ainsi que l'évaluation - non publiée - réalisée par Steve Heder du nombre de morts en excès par rapport à la population escomptée en 1979 à partir d'un échantillon de mille ou mille cinq cents réfugiés décomposé en quatre catégories (1,5 millions selon le chiffre rapporté par Kiernan et Heuveline, entre 1,2 et 1,5 selon les chiffres rapportés par Serge Thion, ou 1,7 selon une communication personnelle récente de Heder) 17.

La même variété s'observe quant à l'évaluation du nombre de survivants. Nous essaierons de retenir celles qui prêtent le moins à la critique. Kiernan en mentionne une donnée par l'A.F.P., sans plus de précision  : 6 millions. Ce chiffre était également répandu parmi le personnel humanitaire en 1979 18. 6 millions était le nombre donné à nouveau en novembre 1980 par un fonctionnaire de l'ONU 19. A la moitié de l'année 1980, l'ONU estimait la population à 5,7 millions. Cette évaluation était basée sur un rapport de la C.I.A., qui évaluait, pour le début de l'année 1979, la population à 5,767 millions 20. Plus tard, dans l'édition de 1994 de ses World Population Prospects, l'ONU révisait ses chiffres  : la population de la moitié de l'année 1980 avait été de 6,7 millions. Patrick Heuveline indique que l'ONU prenait ainsi en compte une enquête réalisée par les autorités du Cambodge sur la base de registres de population tenus par les chefs de village à la même époque. Ce recensement gouvernemental laissait penser que la population de 1980 était de 6,4 millions. Plusieurs observateurs ont d'abord jugée cette estimation gonflée, en premier lieu au niveau local, pour recevoir davantage d'aide du gouvernement, et en second lieu au niveau national, pour obtenir davantage d'aide internationale. Ces chiffres contrastaient il est vrai beaucoup avec ceux publiés précédemment par le gouvernement, qui rendaient Pol Pot responsable d'avoir réduit la population du Cambodge à 4 millions d'habitants. D'autres calculs ont abouti à une évaluation assez haute  : Banister et Johnson, qui considéraient que les chiffres du recensement étaient en sous-nombre en raison des importantes migrations de population dans le pays, aboutissaient à un résultat de 7 millions. Cependant, Patrick Heuveline remarquait que les migrations avaient pu aboutir à ce que les recenseurs eussent interrogé plusieurs fois certaines personnes à l'intérieur du pays. L'estimation de Banister et Johnson serait ainsi surévaluée. Néanmoins, on peut pense que leurs remarques seraient valables pour ce qui concerne les émigrations. En l'état, il paraît difficile d'apprécier un tel chiffre. Cependant, Patrick Heuveline, après des calculs basés sur les registres électoraux de 1993, indique que son estimation aboutissait, pour l'année 1980, à un résultat supérieur de 10 % à l'enquête gouvernementale mentionnée, ce qui, après relecture, signifie qu'il parvenait à 7,04 millions d'habitants (10% de plus que 6,4 millions). Notons que l'on peut considérer que ce calcul prenait aussi en compte la population des camps de réfugiés survivants du K.D. en 1980. La population de 1993 incluait la quasi-totalité des réfugiés. 370 000 d'entre eux devaient être rapatriés pour les élections et ceux restés en Thaïlande étaient autorisés à voter. Cependant, nous ne savons si Heuveline a pensé à comptabiliser les quelques 200 000 réfugiés partis dans des pays occidentaux 21. La population de 1993 ne prenait peut-être pas en compte les Cambodgiens partis dans des pays occidentaux. Ceux-ci comprenaient de toute façon une majorité de personnes éduquées ayant fuit le K.D. très tôt. Malgré les raisons qui peuvent expliquer le chiffre de 7,04, Heuveline suggérait que cela indiquait qu'il n'y avait probablement pas eu autant de «  sous-inscription  » que l'on aurait pu s'y attendre dans le recensement de 1992. Il considérait donc ce calcul comme une estimation haute, à voir un graphique présenté dans son étude. Cependant, il est possible qu'il y ait eu sous-inscription électorale pour des raisons politiques. Selon le même graphique, l'estimation moyenne pouvait être d'environ 6,8 et l'estimation basse de près de 6,2 millions. Si l'on prolongeait la courbe de cette estimation haute, on parviendrait, pour 1979, à une population légèrement inférieure à sept millions (mais peut-être ne peut-on utiliser cette courbe pour estimer l'évolution de la population de 1979 à 1980). En tous les cas, Heuveline écrivait que, rétrospectivement, l'enquête du gouvernement (6,4 millions, un chiffre qui ne comprenait pas les réfugiés) ne paraissait donc plus aussi improbable qu'elle avait pu paraître 22. En 1997, un autre démographe, Jerrold W. Huguet, partant de la population recensée en 1996 parvenait par rétroprojection à une population de 6,55 ou 6,6 millions en 1980 (qu'il disait réduite du fait des flux de réfugiés, ce qui porterait les survivants a peut-être 6,8 millions) 23. En 1993, Banister & Johnson parvenaient, d'après une méthode de décomposition de la population par âge et par sexe, saluée par Heuveline, à une population de 6,36 millions en décembre 1978 et 7 millions en 1980 24.

Une évaluation calculée par Michael Vickery selon plusieurs méthodes parvenait à mi-chemin des estimations gouvernementales et de celles, plus récentes, de démographes  avec un chiffre de 6,7 millions de survivants. Cette évaluation se fonde sur des corrections effectuées au rapport de la C.I.A. sur la base d'impressions tirées de ses propres entretiens, et sur des évaluations officielles de la population vivant à l'intérieur du Kampuchéa données  : 6,59 ou 6,8 millions en 1981 selon le gouvernement cambodgien, et, 6,5 millions en décembre 1980 selon la F.A.O.. Vickery ajoutait au seul chiffre de 6,8 millions les 300 000 Cambodgiens vivant à l'étranger. Nous considérerons aussi que la grande majorité des réfugiés font partie des survivants de tout le régime du K.D. (près de 450 000 partirent en 1979 et en 1984-1985 25) comme nous considèrerons qu'une partie de ceux qui ont voulu fuir le K.D. en sont des victimes. Il effectuait enfin un calcul de décroissement pour parvenir à la population de janvier 1979. La C.I.A. estimait à près de 85 000 le nombre de réfugiés ayant fui durant la période révolutionnaire, mais elle ne tenait pas compte des réfugiés partis des zones révolutionnaires avant 1975, notamment au Sud-Vietnam. Nous supposerons, quant à nous, que les chiffres de 1980 et 1981 contiennent les quelques 150 000 réfugiés revenus du Vietnam au début de 1979 ou en 1980 26, mais pas les réfugiés vietnamiens ou khmers restés respectivement au Vietnam et en Thaïlande (qui peuvent représenter au moins 320 000 Vietnamiens et 35 000 à 50 000 Khmers ayant fui le K.D.27). Ces 150 000 réfugiés étaient presque tous Vietnamiens et n'avaient pas vécu plus de quelques semaines sous le K.D. Ils ne faisaient donc pas partie des 7,1 millions de personnes prises en compte dans nos calculs.

Les évaluations gouvernementales de 1980 soulèvent beaucoup de questions. Elles ont pu être surévaluées à une échelle inconnue pour recevoir plus d'aide, ou sous-évaluée à une échelle inconnue en raison des déplacements de population. Certains statisticiens estiment que le chiffre de 6,6 millions d'habitants à la fin de l'année 1980 comprenait tous les Cambodgiens situés à l'intérieur des frontières, mais Ea Meng-Try estime qu'il omettait les habitants de la zone de résistance - peut-être 1 million en 1982. En ajoutant le nombre de réfugiés à ce chiffre exagéré, on serait parvenu à une population de huit millions d'habitants. Nous ne savons pas non plus si ces chiffres comprenaient les personnes regroupées le long de la frontière, qui, selon une source thaïlandaise représentaient 740 000 personnes en janvier 1980, 150 000 d'entre eux traversant dans les jours suivants 28. C'est là un point capital que nous n'avons pas résolu. Retenons pour l'heure le chiffre de la FAO en décembre 1980, 6,5, fort probablement tiré des 6,4 et 6,59 millions estimés par le gouvernement en 1980 et en 1981. Réduisons-le à 6,35 pour prendre en compte l'arrivée des Vietnamiens partis précocément, et parvenir au nombre de survivants situés en territoire cambodgien. Elevons-le à 6,4 en prenant en compte les 50 000 réfugiés Khmers restés à l'extérieur du territoire. En établissant une projection de population dans le passé, on aurait environ 6,2 millions survivants en janvier 1979. Le déclin absolu par rapport à la population d'avril 1975 s'élèverait alors à 900 000 personnes. Mais en retenant les évaluations de la population parvenant à 7 millions, ce déclin ne serait que de 100 000.

Cependant, comme il y eut des naissances sous le K.D. - ce qu'aucun auteur ne conteste - le déclin par rapport aux prévisions envisageables est plus important. Ce qui nous conduit à nous demander selon quelle proportion la population se serait accrue si la politique du K.D. n'était venue heurter cet accroissement. Il faudrait calculer ce qu'était la moyenne de l'accroissement annuel pendant la guerre. En nous appuyant sur les taux donnés par la C.I.A., le résultat serait de 0,95 % par an 29, contre 2,2 % en temps normal. En supposant que les séquelles de la guerre sur le taux d'accroissement naturel soient longues, on pourrait appliquer à partir des hypothèses pour avril-mai 1975 (7,1 ou 7,3 millions) un taux d'accroissement annuel de 1,5% pendant trois ans et 1,08249999 pour  les derniers huit mois et vingt jours. L'espérance de population en janvier 1979 aurait alors pu être de 7 504 687 ou de 7 716 084. Le déficit démographique s'élèverait alors, pour une population survivante évaluée à 6,2 millions, à près de 1 304 000 ou 1 516 000, et, pour une population survivante probablement sous-évaluée de 5,767 millions (C.I.A.), à 1 736 000 ou 1 949 000 - 1,8 millions était d'ailleurs le déficit maximum envisagé par le ou les statisticiens de la C.I.A, le minimum étant de 1,2. En supposant un taux d'accroissement qui serait remonté, après les destructions, à l'équivalent de 2 %, c'est-à-dire encore un peu moins que 2,2 %, on serait parvenu à une population de 7 643 325 ou 7 858 579 soit un déficit de 1 443 000 à 1 658 579. On peut également tenter d'évaluer, pour chaque année, le nombre de naissances et de morts qui ont pu se produire pendant 3,721333 années sous le K.D. selon un taux annuel de 30 pour 1000 naissances - contre 46 pour 1000 dans les années soixante -, ainsi que le nombre de morts selon un taux de 24 pour 1000, situé à mi-chemin entre le taux estimé en temps de paix, 18 pour 1000, et le taux en temps de guerre, estimé au double selon la C.I.A. En avançant dans les calculs par séquence d'une année, ce qui a pour effet de gonfler les chiffres de quelques centaines, et, pour la dernière séquence, de 0,7216666 année, on passerait, selon une hypothèse de population de départ basse, de 7,1 millions à 7 259 25230. Le déficit de population à imputer à la révolution serait dès lors équivalent à 959 000. En prenant en compte un taux de mortalité à imputer aux séquelles de la guerre de moindre ampleur, les pertes dues à l'application de la politique du K.D seraient plus importantes. Et en considérant que le nombre de naissances réussies ait été plus réduit que celui supposé, les morts dus à l'application de cette politique seraient alors revus à la baisse. Enfin, si l'on pense probable que la population ait été d'environ 7 millions en 1979 (hypothèses hautes de Banister & Johnson et de Heuveline), le déficit brut serait de 100 000 à 300 000 personnes et le déficit relatif de 260 000 à 700 000 personnes. Une mortalité excédentaire de 700 000 ne serait pas en contradiction avec des calculs réalisés à partir de témoignages recueillis de fraîche date qui indiquaient qu'il y eut près d'1,5 millions de décès visibles. La mortalité normale prévisible sur une période de plus de trois ans et demi d'après-guerre donne, pour une population de plus de 7 millions, entre 620 000 et 650 000 morts avec un taux de mortalité évalué à 24 %  et un taux de natalité évalué à 30 %. Les quelques 900 000 disparitions supplémentaires rapportées par les rescapés pourraient bien comprendre 600 à 700 000 décès supplémentaires dus à la politique du K.D. et 200 à 300 000 personnes non encore retrouvées en 1979-1980 ou comptabilisées deux fois lors des enquêtes. La prise en compte d'une mortalité excédentaire de 260 000 obligerait, elle, à remettre en cause le degré de représentativité des personnes interrogées, ou le degré de crédibilité des récits de survivants, que cela soit imputable à leur subjectivité ou au fait qu'ils n'aient pas eu d'informations directes pour un quart des décès rapportés. On sait par exemple que des personnes emmenées pour être rééduquées étaient souvent considérées par leur proches comme ayant été assassinées. A l'inverse, un déficit relatif de 1,4 millions, qui suppose, en prime, des centaines de milliers de morts naturelles, signifierait que les personnes interrogées n'ont pas rapporté toutes les disparitions.

En retenant pour hypothèse un déficit démographique de l'ordre de 250 000 à plus d' 1,6 millions, on aboutit à des chiffres moins précis que ceux de Ben Kiernan (1,7 million) de Michael Vickery (740 000 dont une moitié de personnes exécutées à 1 million) de Ea Meng-Try (1 ou 1,2 millions de morts toutes causes confondues avec une population survivante de 6,1 millions en 1980) de Banister & Johnson (1,05 millions avec une population survivante de 7 millions) et de Kiljunen (1 million), mais toutefois moins larges que ceux du démographe Patrick Heuveline (de 700 000 à 3,2 millions) qui ne remet pas en cause les chiffres de survivants de 1980 donnés par le US bureau of the census - 5,7 millions, sans doute plus pour fin 1978 avant la famine, chiffre qui plus est réévalué par la suite à 6,586 - 31. Nous avons en effet voulu tiré les conséquences des jugements produits par Heuveline. Nous avons employé une façon de procéder ignorée par Ben Kiernan. Enfin, nous avons pris en compte des informations qui n'étaient pas connues de ces auteurs, ou retenu des évaluations et des probabilités qui n'étaient pas toujours exploitées. Ces résultats, basés sur des extrapolations démographiques, restent des hypothèses provisoires. Nous avons entrepris de détailler notre démarche de manière à servir le lecteur susceptible de la poursuivre et de la compléter.

1 Steve Heder, « Democratic Kampuchea : the polls of 1976 », in Phnom Penh Post, May 8 - 21, 1998. Pin Yathay, op. cit., p.235-236. Le vote à main levée était pratiqué au P.C.F. dans les Congrès et les réunions du Comité Central.

2 Ea Meng-Try, «   Recent Population Trend in Kampuchea  », in Ablin & Hood, Cambodian Agony, p.9.

3 Patrick Heuveline, « L'insoutenable incertitude du nombre : estimations des décès de la période Khmer rouge », Population, novembre-décembre 1998, 53e année, n°6, I.N.E.D., pp. 1103-1118 ou du même auteur, « 'Between one or three millions' : towards the demographic reconstruction of a decade of Cambodian history (1970-1979) », Population Studies, vol.52, n°1, March 1998, pp.49-65 et «  Approaches to measuring genocide  : excess mortality during the Khmer Rouge period  », in D. Chirot and M. Seligman, Ethnopolitical Warfare, Washington, 2001, pp.93-108. Autres estimations dans Michael Vickery, Cambodia 1975-1982, Boston, South End Press, 1984, pp.184-188 (réédition 1999 chez Silkworm Books, Chiang Mai), Ben Kiernan, Le génocide au Cambodge, 1998, pp.534-537 (1 671 000, soit 21 % de la population totale), ou «  Le communisme racial des Khmers rouges  », Esprit n°252, mai 1999, p.101 (une fourchette de 1,5 à 2 millions de victimes), Marek Sliwinski, Le génocide khmer rouge, une analyse démographique, l'Harmattan, 1995, pp.37 (2,033 millions soit 26,7%, une probable coquille pour 26,17%), 51 (24,3 % ou 25,6 %). Pour une revue plus ancienne de diverses estimations, Roel Burgler, The eyes of the pineapple, revolutionnary intellectuals and terror in democratic Kampuchea, Verlag breitenbach Publishers, Saarbrücken, Germany, 1990, chap.8, pp.161-169. Pour des estimations anciennes, lire un rapport de la C.I.A. de mai 1980 (« Kampuchea : A Demographic catastrophe », National Foreign Assessment Center, CIA, Washington D.C.), qui collait avec une vision sensationaliste à propos des deux premières années du K.D. (en donnant un chiffrage moyen de 1 150 000 victimes, dont 800 000 des suites des déplacements), mais se montrait aveugle à propos des deux dernières années du K.D. en indiquant que les dernières exécutions eurent lieu en janvier 1977 (cf. Tableau II.4). Serge Thion précisait en août 1980 dans A strange revisitor que ce rapport était « discutable sur de nombreux points » (www.abbc2.com/totus/1963-1980/139revisitor.html). Voir aussi Thion & Kiernan, Khmers rouges ! Matériaux pour l'histoire du communisme au Cambodge, Hallier-Albin Michel, 1981, pp.31-36, Thion, « Cambodge : la catastrophe démographique », in Libération n°2050, 17 septembre 1980. Michael Vickery a souligné que le rapport de la CIA, écrit alors que l'Amérique avait pour but de compromettre la République Populaire du Kampuchéa, passait sous silence le massacre commis par les Khmers rouges à l'Est en 1978 (Cambodia 1975-1982, pp.57, 61, et « Democratic Kampuchea : CIA to the Rescue », Bulletin of Concerned Asian Scholars, 14/4, 1982, p.54).

4 Ida Simon-Barouh et Yi Tan Kim Pho, Le Cambodge des Khmers rouges,… p.121. 

5 Organisation des Nations Unies, Assemblée Générale, 1978, 33e session, 3e Commission, séance 70, 7 décembre 1978, New York, A/C.3/33/SR.70, p.13.

6 Ponchaud, Cambodge année zéro, p.55.  Haing Ngor, Une odyssée cambodgienne, pp.44-48 (chasseurs-bombardiers). Nuon Chea, «  Statement of ...», The Journal of Communist Studies, vol. 3, n°1, March 1987, p.36.

7 Craig Etcheson, Crimes of the Khmer Rouge, chapitre 7 «  Digging the Killing Fields  », pp.145-172, à paraître chez, Mellen. Le lecteur risque d'être désapointé par l'intitulé de ce chapitre.  

8 Judith Banister et Paige Johnson, «  After the Nightmare  : the Population of Cambodia  » in B. Kiernan, Genocide and Democracy in Camobodia, New Haven, 1993, p.91.

9 Archives du Ministère des Affaires Etrangères, série Cambodge Laos Vietnam, sous-série Cambodge, n°15, politique intérieure, 23 août 1962, Jean de Beausse, au sujet du recensement cambodgien.

10 Jacques Migozzi, Cambodge, faits et problèmes de population, CNRS, 1973, pp.126, 203, 212.

11 Kampuchea  : A Demographic Catatrophe, National Foreign Assessment, C.I.A., A research Paper, GC 80-100190, May 1980, p.2. Michael Vickery estime que le rapport de la C.I.A. semble admettre indirectement un nombre de victimes de guerre de 500 000 (Cambodia, 1975-1982, p.333. «  To the Editors  », BCAS, 20/1, 1988, p.72, n.6). Pour 500 000, Chandler, The Tragedy of Cambodian History, Politics, War and Revolution since 1945, Yale University Press, New Haven and London, 1991, p.250. Pour 240 000 victimes de guerre et 70 000 Vietnamiens tués par les troupes de Lon Nol, cf. Marek Sliwinski, op. cit., p.48. Pour 275 000, Banister et Johnson, in Kiernan, Genocide and Democracy, 1993, pp.66, 87.

12 Judith Banister et Paige Johnson, «  After the Nightmare  : the Population of Cambodia  » in B. Kiernan, Genocide and Democracy in Camobodia, New Haven, 1993, p.66.

13 Nous avons raccourci le facteur donné par Michael Vickery pour la CIA, pour le rapprocher de nos calculs. Nous n'avons pu vérifier le facteur donné par Eng Meng Try (Vickery, «  Comments on Cham Population  Figures », BCAS, 22/1, 1990, pp.31-33).

14 Kampuchea  : A Demographic Catatrophe, National Foreign Assessment, C.I.A., A research Paper, GC 80-100190, May 1980, p.4.

15 Sliwinski, op. cit., pp.26 (tableau), 48.

16 William Shawcross, «  The Third Indochina War  », New York Review of Books, April 6, 1978, p.18.

17 Kiernan, Le génocide au Cambodge, 1975-1979, Gallimard, 1998, pp.534-535. Marek Sliwinski, Le génocide khmer rouge, p.15, 26. Communication personnelle de Steve Heder du 9 mars 2002. Serge Thion, rendant compte du livre de Volker Grabowski, ASEMI, vol.XV, 1-4, 1984, EHESS/CNRS, p.492.

18 Daniel Philippidès, «  La situation médicale et sanitaire au Cambodge (1979-1984)  », ASEMI, XV, 1-4, 1984, pp. 244 et 262 (6 590 000 habitants en mai 1981).

19 Michael Vickery renvoie à la F.E.E.R., 14 Nov. 1980, «  Democratic Kampuchea  : CIA to the Rescue  », BCAS, 14/4, 1982, p.54. Patrick Heuveline renvoie à The National Review, 1980.

20 Kampuchea  : A Demographic Catatrophe, National Foreign Assessment, C.I.A., A research Paper, GC 80-100190, May 1980. Heuveline rappelle que selon une estimation apparemment basée sur une étude de la CIA de 1980 pour le milieu de l'année 1980, le Cambodge comptait 5,7 millions d'habitants, et il citait United States Bureau of the Census, 1983, p.240 (« Between one or three millions …», Populations Studies, vol.52, n°1, March 1998, p.52).

21 Sur les rapatriements avant les élections, Banister & Johnson, p.124. Ea Meng-Try parle de 190 000 réfugiés dans des pays occidentaux dès 1981 «  Recent Population Trends  », p.10. Les données de 1987 des Library of Congress Country Studies donnent un chiffre de 208 000 Cambodgiens.

22 Patrick Heuveline, « 'Between one or three millions' : towards the demographic reconstruction of a decade of Cambodian history (1970-1979) », Population Studies, vol.52, n°1, March 1998, pp.52-54.

23 The Population of Cambodia, 1980-1996, and Projected to 2020 (Phnom Penh, National Institute of Statistics, 1997) étude de Jerrold W. Huguet citée dans Huguet, “ La Population du Cambodge, la renaissance après l'hémorragie” , La chronique du CEPED, janvier-mars 2001, n°40, p.1, ou Huguet, Chamratrithirong Aphichat; Rao Nott Rama; Than San Sy, “ Results of the 1998 Population Census in Cambodia ” , Asia-Pacific Population Journal, 2000, Vol. 15, No. 3, p.4.

24 Judith Banister et Paige Johnson, «  After the Nightmare  : the Population of Cambodia  » in B. Kiernan, Genocide and Democracy in Camobodia, New Haven, 1993, p.91.

25 Tableau statistique donné par Judith Banister et Paige Johnson, «  After the Nightmare  : the Population of Cambodia  » in B. Kiernan, Genocide and Democracy in Camobodia, New Haven, 1993, p.125. Une étude thaïlandaise confirme qu'il n'y avait que 10 000 réfugiés cambodgiens vers 1977 et que vers 1988, 97 % des résidents de Khao  I Dang étaient venus en Thaïlande «  en 1979 après la victoire du régime Heng Samrin  » (Thailand  : A First Asylum Country for Indochinese Refugees, Institute of Asian Studies, Chulalongkorn University, Asian Studies Monographs No. 038, 1988, pp.35, 159.

26 O.N.U., Assemblée Générale 1980, 35e session supplément 12, Rapport du Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés (A/35/12), pp.49, 50. Judith Banister et Paige Johnson décomposent l'arrivée des Vietnamiens ainsi  : 100 000 en 1979, et 41 666 en 1980, et pareillement en 1981(«  After the Nightmare  : the Population of Cambodia  » in B. Kiernan, Genocide and Democracy in Camobodia, New Haven, 1993, p.124).

27 De 20 000 à 56 000 avant 1979 en Thaïlande, selon les évaluations de Georges Condominas, Richard Pottier (Les réfugiés originaires de l'Asie du Sud-Est, Documentation Française, 1982, pp.91, 163, 165, 170) ou de Claude Malhuret (Les réfugiés d'Asie du Sud-Est en Thaïlande (1975-1980), 16 août 1980, brochure de M.S.F., 61 p., presses de l'imprimerie Dulac). Environ 34 000 selon des chiffres donnés pour chaque année par Judith Banister et Paige Johnson, «  After the Nightmare  : the Population of Cambodia  » in B. Kiernan, Genocide and Democracy in Camobodia, New Haven, 1993, p.125. 35 000 selon le commandement suprême de l'armée thaïlandaise le 28 juin 1983 (Vickery, «  Refugee Politics  : The Khmer Camp System in Thailand  », Ablin & Hood, op. cit., p.298).  

28 Ea Meng-Try, «   Recent Population Trend in Kampuchea  », in Ablin & Hood, Cambodian Agony, p.4, 11. Thailand  : A First Asylum Country for Indochinese Refugees, Institute of Asian Studies, Chulalongkorn University, Asian Studies Monographs No. 038, 1988, p.50.

29 Kampuchea  : A Demographic Catatrophe, National Foreign Assessment, C.I.A., A research Paper, GC 80-100190, May 1980, p.2. Là où nous sommes parvenus à 0,9525 %, Michael Vickery donnait un facteur de 0,095645 d'accroissement entre 1970 et 1975, «  Comments on Cham Population  », BCAS, 22/1, 1990, pp.31-33.

30 Pour les taux utilisés, cf.Vickery, Cambodia 1975-1982, p.187. Sliwinski indiquait des taux de 4,63% (natalité) et de 1,73 (mortalité) (op. cit.,p.45).

31 Patrick Heuveline, «  L'insoutenable...  », op. cit., p. «  'Between one and three million'  : towards the demographic reconstruction of a decade of Cambodian History  (1970-1979) », Population Studies, 52 (1), March 1998, p.50, renvoie à Ea Meng Try, «  Kampuchea  : a country adrift  », Population and Development Review, 7 (2), 1991, pp.209-228. Ea Meng-Try, «  Recent Population Trends in Kampuchea  », in Ablin & Hood, The Cambodian Agony, pp.3-15, et Banister et Johnson, in Kiernan, Genocide and Democracy, 1993, pp.87-90.

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